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Chirurgie du nerf médian au canal carpien
 

 

Introduction

 

La chirurgie du nerf médian au canal carpien correspond à l’ensemble des interventions réalisées pour libérer le nerf médian au niveau du poignet, ou à le réparer en cas de lésion.

 

Le nerf médian

 

Il s’agit d’un nerf qui chemine depuis la racine du bras jusqu’à la main, en traversant la région du coude, de l’avant-bras et du poignet. Il se termine au niveau de la main, en se divisant en branches sensitives (qui donnent la sensibilité dans les doigts) et une branche motrice (qui permet de contracter les muscles à la base du pouce).

 

anatomie du nerf médian
Anatomie du nerf Médian

 

La sensibilité de la main concernée par le nerf médian correspond à la paume de la main, au pouce, à l’index, au majeur et à la moitié latérale de l’annulaire, ainsi que la moitié distale des ces doigts à leur face dorsale (en rouge sur le schéma).

 

La compression du nerf médian

 

Elle survient lorsque la pression exercée sur le nerf à un endroit de son trajet est trop importante pour que le nerf fonctionne correctement. Il peut s’agir d’une compression aiguë, survenant lors d’un effort important, ou d’une compression chronique, évoluant sur plusieurs mois ou plusieurs années. A part, la compression dynamique, représentée par l’augmentation des pressions dans les loges musculaires lors d’efforts prolongés, comme chez certains sportifs et dans certains travaux manuels.

 

Les principales zones de souffrance du nerf médian se situent au niveau du bras (arcade de Struthers), au niveau du coude et de la racine de l’avant-bras (syndrome du rond pronateur) et au niveau du poignet (syndrome du canal carpien). Ce dernier représente de loin la cause la plus fréquente de compression nerveuse chez l’homme.

 

Le syndrome du canal carpien

 

Il s’agit de la manifestation de la souffrance du nerf médian au niveau du poignet. Les os du carpe, qui articulent la main avec l’avant-bras, forment une arche dont le plafond est formé par un ligament très résistant (le ligament annulaire antérieur du carpe). Il s’agit donc plutôt d’un « tunnel » que d’un « canal » (« carpal tunnel syndrome » des anglo-saxons). Ce canal étant fermé, toute augmentation de la pression à l’intérieur provoquera une souffrance des éléments qui le traversent.

 

coupe anatomique du canal carpien
Coupe anatomique du canal carpien

 

Ce canal contient les 9 tendons fléchisseurs des doigts (1 tendon pour le pouce, et 2 tendons pour chaque autre doigt, en noir sur la coupe anatomique) et le nerf médian, qui est un tronc unique à ce niveau. A la sortie du canal carpien, le nerf se divise en plusieurs branches vers les muscles du pouce et les doigts.

 

Les symptômes du syndrome du canal carpien comprennent habituellement :

 

  • des fourmillements dans les 4 premiers doigts, surtout la nuit
  • une gêne pour les gestes fins et la saisies des objets
  • une tendance à lâcher les objets
  • une perte de force de la main
  • des douleurs au niveau du poignet, à type de brulure

 

En dehors de cette présentation typique, il existe de nombreux cas pour lesquels tous les signes ne sont pas présents. Il s’agit de syndromes atypiques, qui ne sont pas si rares.

 

canal carpien
Vue antérieure du canal carpien

 

Négligé, le syndrome du canal carpien peut évoluer insidieusement, avec une fonte musculaire progressive de la base du pouce et une diminution progressive de la sensibilité des doigts. Au stade ultime, la main est quasi-paralysée, avec un aspect aplati et une insensibilité des 4 premiers doigts.

 

Les lésions du nerf médian au canal carpien

 

Le nerf médian est situé en dessous de la paume de la main. Il est donc particulièrement exposé et vulnérable, notamment en cas de chute sur les mains. Une plaie à ce niveau, accompagnée de sensations de fourmillements dans les doigts, doit imposer une exploration chirurgicale en urgence. Les plaies par objets contondants ou coupants (couteau, verre, objets métalliques) sont également à risque d’entraîner une lésion du nerf médian.

 

Diagnostic

 

Votre médecin traitant peut, au vu des signes que vous lui décrivez, suspecter ce syndrome du canal carpien. Il vous prescrira peut être un bilan biologique (une prise de sang) pour vérifier qu’il n’existe pas de causes hormonales ou métaboliques, qui peuvent déclencher ou aggraver un tel syndrome.

 

Il vous confiera à un chirurgien spécialisé pour confirmer le diagnostic. En effet, certains signes cliniques lorsqu’ils sont retrouvés à l’examen clinique du chirurgien, permettent d’évoquer avec une certaine probabilité ce diagnostic.

 

électromyogramme
Appareil d'électromyographie

 

La confirmation du diagnostic nécessite la réalisation d’un examen électrique du nerf médian, ainsi que des autres nerfs du membre supérieur. C’est l’électromyogramme. Cet examen, réalisé par un neurologue, permet de confirmer la souffrance du nerf, de la localiser, et d’en apprécier la sévérité.

 

Traitement

 

En fonction du stade de gravité et de la souffrance présentée par le patient, plusieurs traitements sont possibles.

 

Une simple surveillance et des examens cliniques réguliers peuvent suffire au stade débutant, avec une gêne peu importante. Les médicaments antalgiques classiques, et même les anti-inflammatoires pour une courte durée, sont généralement efficaces.

 

Lorsque la gêne s’aggrave, notamment la nuit, il est possible de porter une orthèse de protection nocturne, combinée à une mobilisation des doigts avant le coucher.

 

orthèse
Orthèse de protection du canal carpien

 

A ce stade, une infiltration peut être proposée au patient. L’objectif est d’atténuer l’inflammation locale en injectant dans le canal carpien une solution de corticoïdes. L’efficacité de l’infiltration est prouvée, avec des résultats qui sont moins durables et moins fréquents au fur et à mesure que le syndrome s’aggrave.

 

A un stade évolué, la chirurgie doit être envisagée. Elle est généralement proposée par le chirurgien lorsque le traitement médical est inefficace, devant une gêne importante, et une confirmation fournie par l’électromyogramme.

 

De nombreux traitements ont été proposés, comme l’acupuncture, le froid, la relaxation, la sophrologie, les bracelets magnétiques, l’homéopathie, etc… Aucun n’a fait preuve, pour le moment, d’une efficacité thérapeutique. La littérature spécialisée permet de retrouver de nombreuses études à ce sujet.

 

La chirurgie

 

L’intervention chirurgicale réalisée pour soulager le syndrome du canal carpien répond à un cahier des charges précis. L’objectif principal est de libérer le nerf de la pression qui l’empêche de fonctionner normalement. Cet objectif est atteint en ouvrant le canal dans sa portion ligamentaire : c’est la section du ligament annulaire antérieur du carpe.

 

En dehors de cette incision, le chirurgien doit également vérifier le nerf dans sa portion intra-canalaire, explorer le contenu du canal carpien, les tendons fléchisseurs et leur gaine, et l’absence d’élément compressif anormal (masse graisseuse, tumeur, kyste, arthrose du poignet, variation anatomique …).

 

Les différentes techniques réalisées aujourd’hui permettent de libérer le nerf par la section du ligament, depuis le milieu de la paume de la main jusqu’au pli de flexion du poignet. L’intervention peut se réaliser de façon conventionnelle, par « mini-abord » ou par voie endoscopique (en utilisant une mini-caméra).

 

intervention du canal carpien
Section du ligament annulaire antérieur du carpe

 

La technique est laissée au libre choix du chirurgien, les résultats à moyen et long terme n’ayant pas mis en évidence de différence significative d’une technique à l’autre. Les résultats fonctionnels sont identiques, et seule la cicatrice ainsi que les douleurs transitoires sont en faveur de la chirurgie endoscopique. Cette technique a cependant pour inconvénient une plus longue courbe d’apprentissage, un taux de complication brut plus important, et l’impossibilité d’explorer convenablement le contenu du canal carpien, voire de réaliser un geste complémentaire.

 

Une fois que le chirurgien a terminé de libérer le nerf, et vérifié l’absence de nécessité de geste complémentaire, l’abord chirurgical est nettoyé puis refermé. Un pansement ouaté légèrement compressif est appliqué pour 24 à 48 heures. La chirurgie est réalisée dans 94 % des cas en ambulatoire : le patient peut regagner son domicile le jour même de l’intervention chirurgicale, avec les consignes données par le chirurgien et un rendez-vous de contrôle.

 

En cas de plaie, ou en cas de lésion opérée secondairement (plusieurs semaines ou plusieurs mois après l’accident), l’intervention peut durer plusieurs heures, notamment en cas de réparation du nerf par une greffe nerveuse. Cela va nécessiter une mise au repos du poignet pendant quelques semaines. Une rééducation appropriée après ce premier délai de cicatrisation permettra au patient de retrouver la souplesse des articulations du poignet et de la main.

 

Quelles sont les suites de l’intervention ?

 

Les doigts peuvent être mobilisés immédiatement, dès la main réveillée. Les soins locaux sont nécessaires jusqu’à cicatrisation de l’incision cutanée, qui mesure entre 1 et 6 centimètres selon la technique employée. Les gestes de la vie quotidienne sont réalisables dans les jours qui suivent, en prenant garde à ne pas forcer trop tôt. En effet, les douleurs au niveau de la main et du poignet peuvent survenir même pour certains gestes légers (tenir une assiette, conduire, ouvrir un bocal, …). Avec le temps, la cicatrisation du ligament qui a été ouvert va permettre au patient de regagner sa force de serrage. Il faut compter 2 à 3 mois avant de pouvoir forcer complètement avec la main opérée.

 

Les fourmillements dans les doigts et la gêne nocturne peuvent disparaître rapidement après l’intervention, en quelques jours, ou bien persister pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois. Cela dépend à la fois de la sévérité de l’atteinte pré-opératoire et de la capacité du nerf pour cicatriser une fois la compression libérée. A un stade sévère, il est possible de conserver une sensation diminuée, des douleurs, et une gêne pour les activités de la vie quotidienne.

 

Quelles sont les risques de complications du syndrome du canal carpien ?

 

Comme toute intervention chirurgicale, la libération ou la réparation du nerf médian peuvent être suivies de complications.

 

Les douleurs au niveau de la cicatrice ou du talon de la main (zone d’appui) peuvent être importantes et durer parfois plusieurs mois. Ces douleurs, relativement fréquentes, sont souvent dues à un usage trop important de la main après l’intervention. Elles sont améliorées par les massages et la rééducation.

 

Les fourmillements dans les doigts peuvent persister plusieurs semaines voire plusieurs mois. Il est parfois possible de conserver des fourmillements résiduels. La force de serrage de la main reste limitée pendant deux à trois mois, puis revient à la normale progressivement. Une perte de force résiduelle est néanmoins possible.

 

La période post-opératoire peut être marquée par des fourmillements désagréables, qui s'estompent en quelques semaines ou quelques mois. Véritable syndrome de "levée d'obstacle", cette période bien que transitoire est pénible pour le patient. Il s'agit d'une suite classique après souffrance sévère et ancienne du nerf médian, dans les formes vues tardivement.

 

L’infection constitue une complication rare et grave, nécessitant une ré-intervention, avec nettoyage, prélèvements bactériologiques et antibiothérapie adaptée. La précocité du traitement adéquat limite les séquelles ultérieures. L’infection peut être prévenue par une préparation cutanée avant l’intervention, selon les protocoles en vigueur. Certains facteurs de risque augmente le taux d’infection, comme le diabète, le tabagisme, les déficits immunitaires, certains médicaments.

 

L’intervention peut être suivie, après quelques semaines de latence, d’un œdème douloureux avec enraidissement progressif des doigts, du poignet, voire de l’épaule : c’est l’algodystrophie, dénommée aujourd’hui « Syndrome Douloureux Régional Complexe » (SRDC). Les mécanismes mis en cause sont encore mal connus, et comprendraient une activation des voies de la douleur, avec une réponse disproportionnée de l’organisme. Des traitements spécifiques permettent d’en limiter la durée, souvent supérieure à 12 mois.

 

Des lésions peuvent survenir au cours de l’intervention, soit du nerf médian ou de ses branches, soit d’un vaisseau, soit d’un tendon. Dans ce cas, le chirurgien doit être en mesure de réparer la lésion, par suture nerveuse, vasculaire ou tendineuse. Bien qu’exceptionnelle, cette complication reste possible, et justifie à elle seule le recours à un chirurgien spécialisé en microchirurgie pour réaliser l’intervention sur le canal carpien.

 

La récidive du syndrome du canal carpien est estimée, selon la littérature, entre 0,3 et 2,5 %. Il s’agit de l’apparition des mêmes symptômes, plusieurs mois ou années après la guérison des symptômes. Dans ce cas, il est nécessaire de réaliser des examens complémentaires, notamment un électromyogramme, voire une IRM, afin de rechercher une origine à la récidive. Une reprise chirurgicale est possible, en réalisant une libération plus importante du nerf, et parfois d’autres gestes, comme l’utilisation de lambeaux de protection du nerf.

 

Les illustrations de cet articles sont consultables dans : Chirurgie de la Main. Tome 3 : Affections rhumatismales, dégénératives. Syndromes Canalaires. Michel MERLE. Ed. MASSON. Paris, 2007.

 

Pour en savoir plus :

 

Evaluation des bonnes pratiques pour le parcours du patient présentant un syndrome du canal carpien sur le site de la Haute Autorité de Santé.